Deux députés de La France insoumise, Aurélien Taché et Ali Dioura, sont aujourd’hui visés par des plaintes pour avoir osé dire une vérité que certains refusent d’entendre : oui, la police tue. Non comme une insulte gratuite envers une profession, mais comme constat d’une réalité tragique et appel politique à la réforme. Une parole qui, au lieu d’être criminalisée, devrait être entendue.
Ce que les plaintes veulent faire taire : des faits, pas des slogans
En 2023, 52 personnes sont mortes en France lors d’interventions policières. En 2024, ce chiffre est déjà au moins égal, voire supérieur, selon plusieurs observateurs indépendants. Cela représente plus d’un mort par semaine. Depuis la mort de Nahel en juin 2023, 94 personnes supplémentaires ont perdu la vie lors d’interventions policières.
Ces chiffres marquent une hausse continue depuis l’assouplissement de la législation sur l’usage des armes en 2017. La France se distingue désormais en Europe par la fréquence des décès lors d’interactions avec les forces de l’ordre.
Un système en cause, pas des agents isolés
Dire que « la police tue », ce n’est pas accuser chaque fonctionnaire individuellement. C’est pointer une logique de système :
- Une doctrine de l’usage de la force, trop permissive, et peu remise en question.
- Une chaîne de commandement qui peine à reconnaître les fautes, même flagrantes.
- Des responsables politiques qui jouent la surenchère sécuritaire sans repenser les moyens et les pratiques.
Mais c’est aussi interroger les conditions dans lesquelles les policiers eux-mêmes opèrent. Trop souvent, les agents sont mal formés, sous pression, mal encadrés, confrontés à des situations où le temps manque, où les outils manquent, où le discernement est écrasé par le stress.
Le manque de moyens humains, d’encadrement psychologique, de formation au désescalade, tout cela peut conduire à un usage disproportionné de la force, y compris de l’arme létale. Ce n’est pas une fatalité : c’est un choix politique.
Une République ne peut s’accommoder de morts évitables
Mourir à 17 ans pour un refus d’obtempérer n’est pas un fait divers. C’est un échec de l’État. Une démocratie adulte ne peut balayer ces morts sous le tapis ni sanctionner ceux qui refusent de se taire.
Poser la question, nommer les dysfonctionnements, exiger des comptes, ce n’est pas diviser la République, c’est la forcer à rester fidèle à ses principes : justice, égalité, dignité.
Ceux qu’on devrait inquiéter, ce ne sont pas les lanceurs d’alerte
Les familles endeuillées, souvent issues des quartiers populaires, héritières de l’immigration, attendent qu’on les écoute, qu’on les reconnaisse, qu’on réforme. Les députés Taché et Dioura ont porté leur voix. Ils n’ont pas insulté la République : ils lui ont rappelé ses devoirs.
Ce ne sont pas eux qu’il faut blâmer. Ce sont ceux qui, par confort ou par dogmatisme, refusent de voir et de réformer, préférant criminaliser la parole critique plutôt que changer un système qui coûte des vies.
Ouvrir le débat, c’est ouvrir la voie aux solutions
Dire que la police tue, c’est refuser l’impunité, refuser l’oubli, et espérer la réforme. C’est pointer un problème pour mieux le résoudre, avec des réponses structurelles : recrutement, formation, contrôle indépendant, doctrine rénovée.
En démocratie, la critique ne devrait pas être un risque judiciaire. Elle devrait être le point de départ du changement.
Le 22 août 2025