Le Conseil constitutionnel recadre les « contrôles au faciès », c’est le chemin vers une victoire ?

Le Conseil constitutionnel recadre les « contrôles au faciès »

La pratique des procureurs de la République requérant ces contrôles d’identité et des services de police les réalisant n’est pas conforme à la loi, a implicitement reconnu le Conseil.

LE MONDE | • Mis à jour le | Par Jean-Baptiste Jacquin

En rendant son avis sur un sujet aussi délicat que les « contrôles d’identité au faciès », le Conseil constitutionnel jette un pavé dans la mare. Certes il a, mardi 24 janvier, déclaré conformes à la Constitution les textes de loi qui lui étaient soumis sous forme de deux questions prioritaires de constitutionnalité. Mais il reconnaît implicitement que la pratique des procureurs de la République requérant ces contrôles d’identité et des services de police les réalisant n’est pas conforme à la loi. Le Conseil, présidé par Laurent Fabius, accompagne en effet sa déclaration de conformité de deux « réserves d’interprétation » qui risquent de faire du bruit.

Des accusations de contrôles d’identité visant en priorité des personnes qui semblent étrangères, en dehors de tout indice d’infraction, sont depuis des décennies portées par des associations à l’encontre des forces de l’ordre. Ils ont même été documentés par des scientifiques du CNRS et plus récemment par le Défenseur des droits.

Lire aussi :   Le Défenseur des droits dénonce les contrôles « au faciès »

Egalité devant la loi et droit à la liberté d’aller et venir….

Cette fois, deux étrangers en situation irrégulière, soutenus notamment par le Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), le Syndicat des avocats de France et le Syndicat de la magistrature, ont soulevé la question de la conformité à la Constitution et à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen des articles du code de procédure pénale encadrant les contrôles d’identité et de la loi sur l’entrée et le séjour des étrangers. Selon leurs avocats, la combinaison de ces deux textes débouche sur des contrôles qui ne respectent ni l’égalité devant la loi ni le droit à la liberté d’aller et venir.

Ils ont notamment expliqué, lors de l’audience du 17 janvier, que depuis que l’essentiel du séjour irrégulier des étrangers, transféré en 2012 aux juridictions administratives, n’est plus constitutif d’une infraction pénale, les procureurs de la République censés pouvoir requérir des contrôles pour rechercher les auteurs d’infractions ne devraient plus pouvoir viser ces personnes. Or, la pratique démontrerait l’inverse.

Xavier Pottier, membre du secrétariat général du gouvernement et représentant celui-ci à l’audience, avait rappelé que « le législateur a clairement souhaité que ces opérations de contrôle ne soient pas ordonnées de façon aléatoire ou généralisée, mais qu’elles interviennent dans des lieux où des infractions ont été commises ou sont susceptibles de se commettre ». Et de poursuivre, « une trop grande fréquence de réquisitions de contrôle dans un même lieu constituerait une application irrégulière de la loi, qui n’est pas de nature à rendre la loi inconstitutionnelle ».

Lire aussi :   Contrôles au faciès : après la condamnation de l’Etat, la police devra changer ses pratiques

Des contrôles « systématiques » dans certains quartiers

C’est le raisonnement repris par les neuf membres du Conseil. La loi ne prévoit bien évidemment pas de discrimination en fonction de la couleur de peau. Elle est donc déclarée conforme à la Constitution… sous deux réserves. La décision des gardiens de la loi fondamentale précise que les dispositions prévues par la loi « ne sauraient, sans méconnaître la liberté d’aller et de venir, autoriser le procureur de la République à retenir des lieux et périodes sans lien avec la recherche des infractions visées dans ses réquisitions. Elles ne sauraient non plus autoriser, en particulier par un cumul de réquisitions portant sur des lieux ou des périodes différents, la pratique de contrôles d’identité généralisés dans le temps ou dans l’espace. » Or, c’est précisément la pratique exposée à l’audience.

Ruben Garcia, l’avocat de l’un des deux requérants, a ainsi détaillé les contrôles d’identité ordonnés à Paris « par le procureur en étroite collaboration avec le préfet », décidés « systématiquement » dans certains quartiers comme Barbès et menés par l’unité de la police spécialisée dans l’immigration irrégulière. Ces opérations de contrôle, censées être limitées dans le temps, peuvent en réalité avoir lieu tous les jours de l’année.

Une trentaine de réquisitions de ce type ont été produites devant le Conseil constitutionnel, dont une série révèle par exemple soixante heures d’affilée sur un même lieu, au moyen d’une succession de réquisitions du parquet de 0 heure à midi puis de midi à 0 heure…

Des recours en justice inopérants

Pour soutenir l’inconstitutionnalité des textes attaqués, les avocats ont également plaidé le fait que les recours devant la justice étaient inopérants. Car, en cas d’absence d’infraction, aucune trace du contrôle d’identité n’existe. Et, en cas d’infraction, si le juge est saisi d’un recours, il se contenterait de vérifier que la police a bien opéré le contrôle dans un lieu et un horaire conformes à la réquisition du parquet.

Le Conseil constitutionnel rappelle ici les juges judiciaires à leur devoir. « En particulier », lit-on dans sa décision, « il incombe aux tribunaux compétents de censurer et de réprimer les illégalités qui seraient commises et de pourvoir éventuellement à la réparation de leurs conséquences dommageables ». Une sorte de rappel à loi de l’autorité judiciaire.

Cette décision du Conseil constitutionnel pourrait ainsi déboucher sur de nombreux recours contre les contrôles d’identité. Emilie Ganem, l’une des avocats, avait espéré à l’audience que la décision permette « de mettre un terme aux discriminations raciales que constituent ces contrôles ». Elle avait souligné « l’impact social, psychologique et identitaire de contrôles qui nous apparaissent, à nous qui ne les subissons pas, comme des actes de procédure insignifiants ». Ruben Garcia regrette que le Conseil constitutionnel « se borne à condamner la pratique parisienne ».

Source : Le recadrage du conseil constitutionnel sur le contrôle au faciès

Facebook
Twitter
LinkedIn
Email
WhatsApp
Bally Bagayoko - LFI -Saint-Denis - Pierrefitte - Auto écoles

Pour une mobilité accessible aujourd’hui, et durable demain !

Soutien à la mobilisation des auto-écoles et des inspecteurs du permis de conduire – 29 septembre 2025 Nous exprimons notre soutien à la mobilisation des professionnels des auto-écoles et des inspecteurs du permis de conduire, organisée ce lundi 29 septembre partout en France. Aujourd’hui, l’accès au permis de conduire est devenu un parcours d’obstacles : Une situation socialement injuste Dans des territoires comme Saint-Denis, Pierrefitte et plus largement la Seine-Saint-Denis, le permis de conduire reste, pour beaucoup, une condition essentielle pour travailler, étudier, se soigner ou accompagner sa famille, en particulier dans les quartiers ou zones mal desservies par les transports collectifs. Nous pensons notamment

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - LFI -Saint-Denis - Pierrefitte - Agression antisemite Yerres

Déclaration de soutien face à l’agression antisémite de Yerres !

Nous tenons à exprimer notre soutien total et sans réserve à l’homme de 67 ans violemment agressé à Yerres en raison de sa religion, simplement parce qu’il portait une kippa. Les mots prononcés lors de cette attaque ne laissent aucun doute : il s’agit d’un acte antisémite d’une gravité extrême, qui vient heurter nos principes les plus fondamentaux. Dans un moment où les tensions et les haines s’exacerbent, il est de notre devoir humaniste de dire clairement : aucune agression antisémite, raciste ou discriminatoire ne peut être tolérée. Nous saluons le courage des passants qui sont intervenus pour faire cesser l’agression, et nous espérons que

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - Saint Denis - Pierrefitte - Ganda Fadifa

Fierté et hommage : la Place Ganda Fadiga inaugurée à Paris 18e !

Quelle fierté de voir le nom de Ganda Fadiga inscrit dans l’espace public parisien, au cœur du 18e arrondissement. Une belle reconnaissance pour El Hadj Ganda Fadiga, griot soninké malien, conteur exceptionnel et mémoire vivante de la culture soninké, disparu en 2009. De son village natal de Maréna Diombokho (région de Kayes, Mali) jusqu’à Paris, il a marqué des générations par ses sounké (soirées de contes), ses récits légendaires et ses chants engagés. Véritable “griot internationalisé du gambaré”, il a sillonné le monde pour éveiller les consciences et transmettre les valeurs de bravoure, d’humilité et de solidarité chères aux Soninkés. Ses récits évoquaient des figures

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - Saint Denis - Pierrefitte - Football Business - Photo Pixabay

Pour un sport au service du peuple, pas des fonds d’investissement ! Soutien au projet de loi d’Éric Coquerel contre la multipropriété des clubs sportifs.

Le député Éric Coquerel a récemment déposé une proposition de loi visant à interdire la multipropriété des clubs sportifs, notamment dans le football professionnel. Une mesure de justice et de bon sens, dans un contexte où les clubs deviennent les jouets de groupes financiers internationaux. Aujourd’hui, plusieurs clubs français sont détenus ou contrôlés par des groupes étrangers qui possèdent également d’autres clubs en Europe ou ailleurs : Ces opérations représentent des transactions à plusieurs centaines de millions d’euros. À titre d’exemple : Ces montants démesurés révèlent un football financiarisé, devenu une industrie d’arbitrage économique et géopolitique. Les clubs ne sont plus des projets sportifs et

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - Saint Denis - Pierrefitte - 28 septembre - MDPH

Pécresse coupe les vivres aux MDPH : une attaque contre les personnes en situation de handicap

COMMUNIQUÉ DE LA FRANCE INSOUMISE SAINT-DENIS / PIERREFITTE-SUR-SEINE !PÉCRESSE COUPE LES VIVRES AUX MDPH : UNE ATTAQUE CONTRE LES PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP Valérie Pécresse et sa majorité régionale viennent de prendre une décision aussi violente qu’injustifiable : la suppression des subventions régionales aux Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH) en Île-de-France. Une coupe budgétaire de 2 millions d’euros, sur un budget de plus de 5 milliards.C’est un scandale. Et c’est un choix politique délibéré. Les MDPH : des services publics essentiels pour des vies dignes En Île-de-France, il existe 8 MDPH — une par département :Paris (75), Seine-et-Marne (77), Yvelines (78), Essonne (91),

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - Saint Denis - Pierrefitte - 28 septembre - Marche des résistances

Appel à mobilisation – Marche des Résistances – le 28 septembre 2025, partout en France

Initiée par le mouvement Indignons-nous !, cette grande mobilisation nationale s’inscrit dans la continuité des Assemblées Générales locales, qui depuis plusieurs semaines, animent les luttes et rassemblent les voix des précaires, des invisibles, des résistants. Les insoumis·es apportent leur soutien total à cette marche. Pourquoi marchons-nous le 28 septembre ?Parce que nous refusons : Nous marcherons pour : Une dynamique nationale en marche Après la réussite : Nouvelle date de convergence : samedi 28 septembre 2025 Déjà 223 organisations signataires !Ensemble, faisons converger nos luttes dans les rues. Le 25 septembre 2025

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - Saint Denis - Pierrefitte - Drapeau Palestine

Drapeau palestinien levé, peuple oublié : l’indécente mise en scène de Saint-Denis

Ce matin, à l’aube, la mairie de Saint-Denis a hissé le drapeau palestinien sur son fronton. Un geste symbolique fort, en apparence. Mais à y regarder de plus près, ce geste en dit peut-être plus sur ceux qui l’ont orchestré que sur le message qu’il prétend porter. Car dans cette cérémonie surprise, tout a été pensé pour la communication, rien pour la mobilisation populaire. Aucune invitation lancée à la population. Aucun message aux collectifs engagés depuis des mois pour la reconnaissance de la Palestine. Aucune coordination avec les associations locales, ni avec les comités de soutien palestiniens, ni même avec les groupes d’opposition municipaux. Pire

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - Saint Denis - Pierrefitte - Fresque Fraternité

Quand on efface l’art, on abîme la mémoire. Destruction de la fresque La Fraternité à Saint-Denis : consternation, émotion et exigence de réparation.

Il existe des œuvres dans nos quartiers qui dépassent leur simple statut artistique.Elles sont des repères visuels et affectifs, des fragments de mémoire collective, des témoins d’histoires populaires. C’était le cas de la fresque La Fraternité, peinte en 1993 sur un mur de la cité du Franc-Moisin à Saint-Denis.130 mètres de fresque.130 mètres de vie, de symboles, d’histoire. Aujourd’hui, cette œuvre a été détruite, sans qu’aucune alerte n’ait été sérieusement prise en compte. Elle représentait une femme kabyle au-dessus d’un globe tenu par une main : une allégorie d’un Nouveau Monde, réalisée par l’artiste américain Eloy Torrez, dans le cadre d’une commande du ministère de

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - Saint Denis - Pierrefitte - Carole Delga

Ma réponse aux propos inacceptables de Carole Delga, présidente de la Région d’Occitanie !

Je suis choqué mais, hélas, plus surpris.Carole Delga, présidente socialiste de la région Occitanie, vient une nouvelle fois de franchir une ligne grave. Affirmer avec une désinvolture insupportable que « sur le terrain, Jean-Luc Mélenchon fait plus peur que Marine Le Pen. En Seine-Saint-Denis, ce n’est peut-être pas le cas, mais dans le reste de la France, c’est la réalité », ce n’est pas seulement inacceptable.C’est participer activement à la banalisation de l’extrême droite, à la diffusion de ses idées, et à la disqualification de celles et ceux qui la combattent réellement. En mettant la France Insoumise – et Jean-Luc Mélenchon – au même niveau

LIRE L'ARTICLE »