L’Assemblée nationale a adopté, à une voix près, la proposition de résolution n°639 déposée par le Rassemblement national (RN) visant à dénoncer l’accord franco-algérien de 1968 sur la circulation, l’emploi et le séjour des ressortissants algériens en France.
Un texte sans effet juridique immédiat, mais au poids symbolique considérable : il traduit un basculement politique et moral.
En choisissant de voter avec l’extrême droite, une partie de la droite républicaine et de la majorité présidentielle a franchi une ligne rouge. Ce vote, intervenu à la veille du 1er novembre, jour anniversaire du déclenchement de la guerre de libération nationale algérienne, résonne comme une provocation et une rupture avec notre mémoire commune. Ce qui devait relever de la diplomatie est devenu une arme politique intérieure, utilisée pour attiser la peur et les divisions.
Les chiffres rappellent la démesure du débat : 93 % des obligations de quitter le territoire (OQTF) concernent des personnes sans casier judiciaire, et la France prononce beaucoup plus d’OQTF que ses voisins européens. De plus, l’accord bilatéral de 2013 est déjà suspendu, ce qui rend cette surenchère inutile sur le plan pratique.
Derrière ce vote, il y a plus qu’un désaccord diplomatique : il y a la tentation d’effacer plus de soixante ans de liens humains, économiques et culturels entre les deux rives de la Méditerranée. En s’attaquant à cet accord, on touche à une histoire partagée, faite de travail, d’amitiés, de familles et d’espoirs. On piétine aussi la promesse d’une France fraternelle, capable d’assumer son histoire coloniale et de regarder vers l’avenir avec lucidité et respect.
Mais cette défaite morale ne vient pas seulement des votes favorables : elle vient aussi des absences et des silences. Trop de bancs sont restés vides. La vigilance républicaine n’est jamais acquise, et chaque absence fragilise le camp de la justice et de la fraternité. Une seule voix a manqué, mais elle a suffi à offrir une victoire symbolique à la peur.
Je le dis avec conviction : les Algériens, Marocains et Tunisiens sont nos frères en humanité. Leur histoire est intimement liée à la nôtre. Face à ceux qui attisent les peurs, nous devons choisir la mémoire plutôt que l’oubli, la solidarité plutôt que le rejet. La France se grandit quand elle tend la main, quand elle assume son passé, quand elle construit des ponts plutôt que des murs.
Ce moment doit être un électrochoc collectif. Il est temps de reconstruire le camp de la justice, de la solidarité et de la raison, de rassembler la gauche, les écologistes et les progressistes, et de défendre une France fidèle à ses valeurs républicaines et à sa dignité.
Parce que la France est plus forte quand elle n’a pas peur, et parce que l’avenir se construira des deux côtés de la Méditerranée, dans le respect, l’égalité et la fraternité.
Le 30 octobre 2025








