J’ai récemment reçu le compte rendu d’une réunion, transmis par des parents dont les enfants fréquentent l’Espace Jeunesse de Pierrefitte-sur-Seine. Leur témoignage, empreint d’inquiétude et de dignité, m’a profondément touché. Je comprends pleinement leur consternation face à une situation qui, au-delà de l’indignation qu’elle suscite, appelle une réponse urgente et responsable.
Ce qui se passe aujourd’hui à Pierrefitte s’inscrit malheureusement dans une dynamique plus large que nous observons déjà à Saint-Denis. La fusion entre nos villes, au lieu de renforcer les services publics, semble servir de prétexte pour affaiblir encore davantage les politiques menées en direction de la jeunesse. Ce choix politique, que rien ne justifie, risque de priver durablement les jeunes de repères, d’espaces d’expression et d’émancipation. Il est de notre devoir collectif de refuser cette régression.
Les parents, tout comme les professionnels de terrain, expriment une attente forte, légitime et profondément responsable. Ils ne demandent pas l’impossible, mais des moyens décents pour que leurs enfants puissent bénéficier d’un accompagnement éducatif digne de ce nom. Ce que nous dénonçons ici, c’est l’abandon progressif d’une politique publique essentielle.
La réunion évoquée dans le compte rendu révèle un profond désarroi. Aucun engagement clair n’a été pris, aucune solution immédiate n’a été avancée, au motif que le responsable de service est actuellement en arrêt maladie. Est-il concevable que le bon fonctionnement d’un service aussi stratégique dépende de la seule présence d’un cadre, sans qu’aucune continuité ne soit assurée ? L’urgence ne peut être suspendue à l’absence d’un individu, aussi important soit-il.
La réponse provisoire proposée — confier à une secrétaire administrative des tâches relevant à la fois de la gestion et de l’animation auprès des jeunes — est non seulement inadaptée, mais aussi irrespectueuse du sérieux et de la technicité que requiert le travail éducatif. Cette confusion des rôles trahit une méconnaissance de la réalité de terrain, et un manque de considération pour les professionnels.
Aujourd’hui, les projets construits par les équipes jeunesse sont à l’arrêt. Ces projets n’étaient pas de simples animations : ils incarnaient des valeurs fortes, celles de l’écoute, du respect, du vivre-ensemble, de la confiance en soi. Ne pas leur donner suite revient à priver les jeunes d’un espace où ils peuvent grandir, se construire, s’exprimer. C’est aussi faire peser sur les familles une charge supplémentaire, dans un contexte déjà difficile.
Face à cela, les revendications des parents sont claires, mesurées et justes :
- Un engagement budgétaire suffisant pour garantir la continuité et la qualité des actions éducatives ;
- Des contrats stables et adaptés pour les professionnels en charge de l’accompagnement des jeunes ;
- La juste reconnaissance du travail accompli, notamment par le paiement sans délai des heures supplémentaires effectuées ;
- Le recrutement rapide de personnels qualifiés, formés, capables de répondre aux besoins des jeunes ;
- Un cadre structuré, lisible, pour accompagner les équipes dans la transition induite par la fusion communale.
Il ne s’agit pas d’une simple liste de doléances, mais de la défense d’un bien commun : un espace dédié à la jeunesse, pensé non comme un lieu de garde, mais comme un lieu de construction, de lien social et d’émancipation.
Les parents, par leur mobilisation, témoignent d’un attachement profond à ce service public, et d’une confiance dans ce qu’il peut offrir à leurs enfants. Les agents, quant à eux, continuent à se battre, malgré des conditions de travail précaires, pour maintenir un lien avec les jeunes. Ces efforts doivent être soutenus, reconnus, accompagnés.
Pour l’avenir de notre jeunesse, nous ne pouvons pas rester silencieux.
Nous appelons la municipalité à entendre cet appel, à sortir d’une posture attentiste, et à prendre ses responsabilités. Il est encore temps d’agir, avec humanité, lucidité et courage politique.
Le 22 octobre 2025