Déclaration de Bally BAGAYOKO
« A la roulette russe, il vous faut s’avoir choisir votre cible prioritaire parmi toutes. Pour moi se sera le FN »
Nous voilà arrivés au second tour de l’élection présidentielle, d’ici quelques jours. Une situation complexe qui nécessite que, de manière légitime, les débats aient lieu dans l’opinion publique, loin des consignes de vote qui restent inaudibles tant le milieu politique est décrié. J’ai été questionné par un grand nombre d’entre vous sur ma position.
Cette position qui est la mienne, n’a pas vocation à se transformer en consigne de vote, elle n’a pas vocation à s’imposer à mes formations politiques, car je considère que chacun-e, citoyen-ne, militant-e, société civile, est suffisamment intelligent-e et responsable pour prendre sa décision entre un Emmanuel Macron, candidat de la finance et une Marine Le Pen, égérie de la haine, du racisme et de la terreur. Aucune hésitation dans mon choix, tant je ne veux laisser aucune chance à celle qui est et reste l’ennemie numéro de tous ceux et celles qui ont la solidarité, la dignité, la fraternité, l’égalité et enfin la République dans leur cœur.
Ma position est une contribution ultime au débat citoyen qui est ouvert. Un débat qui fait suite à la campagne exceptionnelle de mon candidat Jean-Luc MÉLENCHON, avec le programme l’Avenir En Commun, que je salue pour son dynamisme, ses convictions et son respect des citoyens et citoyennes.
Des attentes immenses, avec plus de 7 millions de voix pour La France Insoumise, soit 19, 6 % des électeurs, une percée sans précédent dans de nombreuses grandes villes et dans les DOM-TOM. Jean-Luc MÉLENCHON arrive en tête en Seine Saint-Denis et sur plusieurs circonscriptions. L’histoire aurait manifestement pu s’écrire autrement, mais pas question de bouder ce qui pour moi reste une victoire.
- Qui aurait parié que l’on aurait un engouement et une adhésion aussi forts autour de la démarche de la France Insoumise et son ambition de mettre le peuple au centre des enjeux et du pouvoir avec la création d’une 6eme République ?
- Qui aurait imaginé que la France Insoumise deviendrait la première force politique à gauche, devant le PS, désormais affaibli ?
- Qui aurait pu penser que la crise sociale terrible qui secoue le peuple depuis des années éclaterait ainsi dans le vote de la présidentielle ?
- Qui aurait imaginé que le rassemblement traditionnel entre le PS, EELV, PRG serait mis en échec lors de cette présidentielle ? Les grandes unions sont désormais dépassées. Une recomposition est manifestement en marche. Cela interroge les partis politiques traditionnels quant à la nécessité de faire de la politique autrement, en lien avec le peuple.
Oui, la gauche alternative et écologique, incarnée par Jean-Luc MÉLENCHON aurait pu être au second tour, seulement si les 600 000 électeurs manquant avaient été au rendez-vous, seulement si le candidat PS qui n’avait plus aucune chance de se qualifier, avec une tendance négative dans les sondages, avait accepté de se retirer dans l’intérêt supérieur du peuple de gauche, qu’il dit avoir au cœur. Seulement si tous les candidats à la présidentielle, qui depuis s’alarment en demandant un front républicain, n’avaient minoré le risque de la candidate du FN. Seulement si, le reste du temps les mêmes qui appellent à ce front républicain, n’empruntaient, les idées de la frontiste pour draguer son électorat et restent globalement silencieux à dénoncer ce parti ou à exiger son éradication. L’affaire de la journaliste Audrey PULVAR, mise à l’écart par la chaine CNews, dans l’indifférence générale au motif qu’elle a eu le courage de s’opposer au FN en signant une pétition, en est une triste illustration.
C’est d’ailleurs étonnant de voir que dans les rangs des différents courants politiques, qui se singularisent par la prolifération des candidatures à droite comme à gauche, seul le FN élection après élection ne présente qu’une seule candidature. Le FN serait-il épargné par la bataille des égos ? Seulement si les médias n’avaient pas aussi contribué à promouvoir la candidate de la division de la France, en développant une stratégie de dédiabolisation.
La situation ainsi créée appelle en responsabilité une prise de position. J’ai souhaité réserver ma décision, après l’annonce des résultats de la consultation de la France Insoumise qui aura lieu le 2 mai dans l’après-midi, par respect pour mes camarades qui ne feront pas le même choix que moi. Je salue la position de Jean-Luc MÉLENCHON qui s’est refusé à donner des consignes de vote, en respectant l’espace de la consultation prévue au sein de la France Insoumise, n’en déplaise à certains.
Mon choix est animé par mon histoire personnelle, celle de mes parents, de mes luttes pour les droits humains auprès du MRAP, mon engagement associatif dans le milieu sportif aux couleurs du monde, par cohérence avec mes convictions politiques et humanistes. Français, de parents originaires du Mali, je sais combien la question du racisme, de la xénophobie, sonne comme un déchirement dans chacune de mes connaissances. Je sais combien elle mine et divise notre société humaniste, en France comme ailleurs. L’histoire nous rappelle de manière incontestable la place que cette idéologie fasciste et raciste a eue dans l’histoire de France et que nos anciens ont combattue en 1936, 1940 et 1944. Chaque année nous commérons ces périodes sombres de notre histoire collective, pour que cela ne se reproduise plus : souvenir des victimes et des héros de la déportation, celle de la journée des victimes des crimes racistes et antisémites, en hommage aux harkis, de la guerre d’Algérie, de l’esclavage. Ce combat est malheureusement encore d’actualité et chaque pourcentage engrangé par ces soldats de haine, permettra de maintenir l’espoir dans la victoire possible de leur idéologie, auprès de leur pair.
Au second tour, seuls deux bulletins seront présents. Celui d’Emmanuel MACRON et celui de Marine Le Pen. Les électrices et les électeurs auront à se prononcer sur ces deux candidats. En ce qui me concerne, le projet des deux candidats ne me séduit aucunement. Leurs projets de société sont loin de mon idéal de société que j’appelle de mes vœux pour mes enfants. Mais je ne donne pas le même sens aux deux candidatures présentes. Le premier souhaite promouvoir une société de la loi du plus fort où l’Humain est renvoyé à l’asservissement au pouvoir de la finance et l’autre une société de barbares où seuls ceux qui haïssent le plus leur prochain, auront droit de cité. Un vote pour le FN est juste impensable et inimaginable, ce vote serait pour moi une non-assistance à une société en danger, une trahison ultime, irréparable sur le plan de la morale et de mes convictions.
J’exclus de fait l’abstention et le vote blanc, qui ne sont pas à la hauteur de l’enjeu et du risque majeur que porte le projet de société du FN. Néanmoins, je peux comprendre mes camarades et amis-es qui se réfugient sur l’un de ces choix. D’autant plus lorsque le candidat MACRON refuse la main tendue de Jean Luc Mélenchon, refuse la volonté des 7 millions d’électeurs, sur la question sociale. Par ce refus, il a une responsabilité majeure dans la montée du vote blanc et de l’abstention et donc de l’écart qui se réduit de plus en plus entre lui et la candidate FN. C’est à lui de convaincre et non aux Insoumis et au peuple de gauche de faire allégeance. C’est à lui de rassurer et de montrer qu’il doit être digne de leur vote. Ces dernières prises de parole semblent s’écarter de cet objectif. A croire qu’il recherche déjà des coupables, justifiant la montée du FN et son échec prévisible, si son discours n’évolue pas dans le sens du rassemblement des Français et Françaises.
Je ne suis pas irresponsable, comme l’ont été les dernières prises de position de E. MACRON. Il ne s’agit pas de lui à travers mon vote mais d’elle. Devant un enjeu supérieur aux deux projets que je désapprouve, j’assume le fait de combattre la candidate du fascisme, le racisme en choisissant mon arme et le lieu. Ce sera dans les urnes de manière claire en utilisant le seul bulletin le permettant, celui d’Emmanuel MACRON et se sera le 7 mai.
Mon objectif est de contribuer à réduire le plus possible sa progression, tout en évitant une victoire écrasante du candidat MACRON, qui risquerait de devenir incontrôlable et pourrait se prévaloir d’avoir un plébiscite de son projet. Le seul problème, c’est que personne ne sait doser, personne ne sait dire et écrire ce qui va se passer réellement, encore moins les instituts de sondage. Alors, j’assume le choix de l’assurance. Je l’assume d’autant plus que, je reste inquiet sur la campagne entre deux tours de E MACRON, qui intervention après intervention semble faire progresser la candidate de la haine et baisse dans les intentions de vote. Nous sommes au porte de la catastrophe.
A la « roulette russe », lorsque vous n’avez qu’une seule balle de disponible, alors, il vous faut choisir votre cible prioritaire parmi toutes. Ma cible de choix sera le FN et son industrie de la haine. En aucun cas je ne veux participer à l’effet accélérateur des idées frontistes, que nos anciens et disparus ont combattu pour nous permettre de vivre en liberté. Une liberté qui reste fragile et qui sera, jour après jour, indéniablement mise à mal avec l’arrivée au pouvoir de sa candidate.
Il ne s’agit aucunement d’un vote d’adhésion au projet En Marche, ni d’une invitation à rejoindre le mouvement, mais un vote de survie le 7 mai prochain. Je n’ai aucune illusion sur les conséquences du projet de Macron et sa responsabilité dans les politiques d’austérité, dans l’octroi de plus de 80 milliards au MEDEF et de casse sociale au sein du gouvernement Valls, en tant qu’ancien ministre de l’économie. C’est pour cela que dès le 7 mai à minuit, nous serons disponibles pour lui faire face, sans hésitation. L’histoire devra retenir l’ensemble de ma réflexion et non prendre des raccourcis.
La partie ne sera pas finie après le second tour de l’élection présidentielle. J’ai l’intime conviction que nous pouvons prendre notre revanche lors des élections législatives du 18 juin prochain avec un nombre important de parlementaires de la gauche alternative: Insoumis-es, Ecologistes, Communistes, Ensemble!, PG, citoyen-nes, en imposant une cohabitation, seul moyen de tenir la main de notre futur bourreau.
C’est cette perspective qui rend encore possible, la mise en application d’une partie du programme l’Avenir En Commun. C’est désormais cet espoir que nous devons avoir en ligne de mire après avoir écarté par notre vote, le FN des portes du pouvoir. Enfin, pour que la grande chanson « faire barrage au FN » n’apparaisse que lors des échéances électorales, il convient au quotidien de lutter réellement pour endiguer sa progression dans les idées, les pensées, par le débat et la conviction. Issu d’une terre de résistance, je sais combien aucun espace ne doit être laissé à l’ennemie de la République.
Comme, il y a nécessité que la force populaire s’empare de l’indispensable construction d’une nouvelle force politique de transformation, rassemblant l’ensemble des pensées progressistes, citoyennes et écologiques.
Le 7 mai, il ne s’agit pas que de nous mais aussi d’eux. Toutes ces personnes étrangères qui ont choisi la France comme idéal de vie, tous ceux et celles qui y ont trouvé refuge sous le drapeau de la Liberté, de l’Égalité et de la Fraternité. C’est aussi pour eux que je voterai le 7 mai 2017 contre la candidate du Front National, car sans aucun doute ils et elles seront les premières victimes de chasse à l’homme désormais à nos portes. C’est aussi pour eux que, je contribuerai à l’obtention d’une majorité de parlementaires de la gauche alternative et écologique à l’assemblée nationale, pour continuer à porter l’étendard de la Place du Peuple. Soyons fier-es de l’aventure de la France Insoumise et de son candidat et prenant l’engagement collectivement de la promouvoir, de l’amplifier, de l’élargir, car le tsunami des Insoumis est en marche, dans son sillage le libéralisme et la haine, périront. C’est juste une question de temps et de volonté.
Bally BAGAYOKO
Porte-Parole Sport de Jean Luc Mélenchon