[# Une contribution de Jean Luc Mélenchon à réflexion collective en cours au sein du mouvement de la France Insoumise . Bally Bagayoko]

[# Une contribution de Jean Luc Mélenchon à réflexion collective en cours au sein du mouvement de la France Insoumise . Bally Bagayoko]

« La marche contre le coup d’État social ce samedi 23 septembre à Paris est un événement politique et social majeur. Il a confirmé le potentiel de combat que contient notre peuple. Une telle masse humaine ne se concentre pas sans de puissantes raisons et sans une ardente volonté. Tant de joie, sourires, clameurs de chaleureuses salutations au fil du cortège ne peuvent venir que du plus profond de ce qui nous réunit comme peuple. Au demeurant, la haine de nos adversaires a aussitôt grimpé à des altitudes qui signalent l’intensité de la peur que l’événement leur a fait ressentir.

Pour ce qui concerne la France insoumise, le mouvement qui portait tout le travail d’organisation de l’événement, ce fut aussi un test victorieux de grande ampleur. On ne mobilise pas des milliers de personnes venues en cars, en train, en covoiturage, on ne cadre pas un tel cortège sans un seul incident et sans une seule dégradation le long du parcours, on ne disperse pas en moins de cinq minutes une attaque comme celle que nous avons dû subir contre notre scène centrale, sans que tout cela signale une incroyable capacité d’auto-organisation de tous ceux qui ont apporté leur concours à ces tâches. L’énergie qui se dégageait au total de ce rassemblement me galvanisa fort opportunément. En effet, il vous reste à savoir que j’avais à ce moment-là une grosse grippe qui m’avait cloué la veille au lit et qui m’a laissé sur l’estrade encore avec les jambes en coton et le corps ruisselant de fièvre.

Pendant toute la durée du cortège, les députés de la France insoumise, perchés sur les camions-plateaux, s’étaient adressés aux rangs serrés de manifestants organisés par région. Puis, comme la place de la République s’était remplie avant même que tout le cortège soit parvenu, une dizaine de vidéos permirent à des acteurs du mouvement social de s’exprimer. Ma prise de parole en conclusion devait être le moment d’une explication et de deux propositions. L’explication, c’est évidemment celle du sens du moment politique que nous vivons. Il s’agissait de montrer, une fois de plus, que la mise en cause de la hiérarchie des normes dans le code du travail est une mise en cause globale de l’ordre public social républicain. On ne doit pas cesser de le rappeler. La confrontation en cours n’est pas « seulement » sociale. Elle est avant tout profondément politique. Elle ne peut être disjointe des autres événements en cours dans toute l’Europe en proie à un durcissement de la vague néolibérale. J’ai dit à ce sujet que « la bataille de France » était commencée pour les libéraux après la série des escarmouches et reconnaissances en profondeur que furent les quinquennats de Sarkozy et Hollande sur ce thème. Macron attaque tout, tous, partout en même temps. C’est le fait majeur qu’on ne saurait contourner. Voici une occasion de revenir sur le sujet avec ces lignes.

Le durcissement néolibéral n’a qu’un résultat pour l’instant dans toute l’Europe au-delà du Rhin : les percées de l’extrême droite. Aucune force de notre famille politique ne semble capable d’enrayer ce processus et de prendre en compte le « dégagisme » qui s’exprime partout. Pour l’instant, les points d’appui de l’arc alternatif sont en Grande-Bretagne avec le Labour de Jeremy Corbyn, en Espagne avec Podemos et en France avec « la France insoumise ». En Allemagne, « Die linke » tient bon et progresse à l’ouest mais peine du fait du poids des vieilles structures routinières postcommunistes de l’Allemagne de l’Est. Au total, la dispute est loin d’être terminé pour savoir qui de l’extrême droite ou de notre courant finira par l’emporter dans cette séquence de l’histoire. C’est dans ce contexte qu’interviennent les événements en France. Il y a eu notre résultat aux élections présidentielles, puis aux législatives avec l’émergence de notre groupe au Parlement. Les électeurs et notre mode d’intervention nous ont donné une place prééminente dans l’espace politique que dirigeait avant cela la « vieille gauche » sous la conduite des sociaux libéraux du PS. C’est cette responsabilité que nous assumons lorsque nous avançons des propositions, des mots d’ordre et ainsi de suite. Encore cette fois-ci.

Après de longues consultations et discussions tous azimuts aussi bien dans les rangs des divers organes de « la France insoumise » qu’avec nos proches interlocuteurs, deux objectifs ont donc été mis sur la table. Le premier c’est l’idée d’organiser un grand mouvement d’ensemble des organisations syndicales et politiques qui, chacune pour leur raison et sous leurs mots d’ordre, veulent le retrait des ordonnances sur le code du travail. Une initiative qui aurait lieu avant le retour de la loi devant les assemblées. Une initiative qui soit une vraie démonstration de force générale. « 1 million de personnes sur les Champs-Élysées » ai-je évoqué. J’ai dit que nous étions prêts à nous placer sous la conduite les organisations syndicales si elles le voulaient. On ne saurait mieux dire que dès lors, c’est elles qui ont la main.

Cette proposition correspond à ce qui me remonte de tous côtés. De partout s’affirment à la fois une claire volonté de faire front et d’un autre côté une lassitude devant le sentiment d’éparpillement des forces. Notre raisonnement est que de toutes parts monte l’envie de contre-attaquer face à l’offensive du président de la république et de son gouvernement. Il ne s’agit pas d’une pulsion émotive mais bien d’un courant profond et réfléchi. Il touche tout le monde sur le terrain et il impacte donc toutes les structures. En atteste l’extrême diversité de tous ceux qui se sont retrouvés le 23 dans la rue, tant du côté syndical que politique. Nous ne savons pas sous quelle forme cette énergie peut se manifester et modifier la scène actuelle. C’est pourquoi cette proposition a été faite pour lui ouvrir un débouché positif. D’ores et déjà, nous prenons nos dispositions pour prendre contact de tous côtés. En même temps notre propre capacité d’initiative restera intacte si tout devait s’engluer dans les bavardages tortueux que ce type de situation génère souvent. Car la convergence des forces est un moyen indispensable. Mais elle n’est pas une condition indépassable ni une fin en soi.

En toute hypothèse, dès samedi prochain, nous proposons que partout, sous les formes adaptées aux circonstances et aux moyens locaux, que s’organisent des « casserolades ». C’est-à-dire une présence bruyante comme il s’en est organisé autrefois contre l’ancien régime et plus récemment dans les rues de l’Amérique latine et de l’Espagne pour affronter les gouvernements néolibéraux. Il va de soi que toutes les initiatives et les trouvailles seront les bienvenues. Le but est de montrer que d’une façon ou d’une autre, la prise de conscience et la mobilisation sont toujours là quoi qu’il arrive. Dans l’intervalle, il y aura eu des mobilisations syndicales décisives. Celle des transporteurs, puis celle des retraités le 28 septembre. De la sorte, la semaine entière devrait encore être une semaine de confrontation avec les organisateurs du « coup d’État social ».

La seconde proposition a été d’adresser un appel à l’action de la jeunesse. Déjà dans la marche elle-même, un puissant cortège de jeunes avait été constitué, regroupé autour de ses pancartes revendicatives. Car la jeunesse du pays est très fortement impactée par le bouleversement en cours. À partir de 16 ans, avec la fin de la scolarité obligatoire, commence pour chacun le temps d’un choix. Soit entrer dans la vie active aux conditions de travail dégradées du nouveau code du travail et aux contrats « chiffon de papier », soit la poursuite d’études vers un bac dont il est prévu qu’il ne soit plus la clé d’entrée universelle vers les formations supérieures. La mobilisation de la jeunesse serait évidemment un puissant facteur de conscientisation dans le pays et une aide considérable apportée aux combats de leurs parents.

Sur ces deux terrains, « la France insoumise » entre en action. Avec confiance et solidité. Bien sûr, dans de tels domaines, rien n’est jamais assuré. Mais rien ne l’est encore moins si rien n’est entrepris. La singularité de notre responsabilité nous interdit de reporter sur d’autres la rédaction d’une feuille de route claire. Advienne que pourra, nous aurons fait notre devoir.

Face à ce plan de marche, il faut reconnaître à l’équipe Macroniste le mérite d’avoir su immédiatement déployer les moyens d’une diversion de première grandeur. Je n’ai jamais comparé le gouvernement actuel aux nazis, cela va de soi. Qu’un Castaner veuille le faire croire est de son niveau. Mais qu’il soit relayé pour faire du buzz dit bien le niveau d’abaissement auquel en sont rendus d’aucuns. Tout le monde peut vérifier le montage mensonger qui est fait de mon propos en regardant le début de mon discours puisqu’il reste en ligne.

J’ai répliqué au président qui affirmait « la démocratie ce n’est pas la rue » en lui demandant d’apprendre son histoire de France. Il y aurait vu que la démocratie vint par la rue quand celle-ci abattit les rois, chassa les nazis, créa le droit à la section syndicale, la quatrième semaine de congés payés en 1968. Puis j’ai lu une liste de recul gouvernementaux obtenus par la rue depuis 1986, avec le retrait de la loi Devaquet sur la sélection à l’entrée de l’université, en 1995 avec le retrait du plan Juppé et jusqu’à 2008 avec le retrait du plan Darcos sur la réforme du lycée. Je n’ai pas allongé la liste. Cela suffisait à ma démonstration. Et c’est bien cela qui pose problème à ces gens. La preuve est là non seulement du rôle de « la rue » dans l’histoire, mais surtout de ce qu’elle a pu obtenir déjà !

Au total, « la rue », ce 23 septembre, a fait une nouvelle fois une démonstration de force extraordinaire. Et c’est le problème de ce pouvoir. La suite de la contre-offensive des Macronistes, méthodiquement organisé sur l’ensemble des médias, a conduit cependant à une impressionnante réécriture de l’histoire. Soudain, c’est l’idée même que le peuple se soit libéré lui-même des nazis qui a été remise en cause. Sous le masque des indignations ostentatoires perce le front du révisionnisme traditionnel de la caste en France. Car s’il est évident que la guerre a été gagnée du fait des victoires de l’armée rouge contre les nazis et de l’appui des débarquements en Provence et en Normandie, nier le rôle au peuple français dans sa propre libération est un franchissement de seuil dans l’art de nier l’identité républicaine du pays. Le pire sans doute a été ce moment où, à ma stupeur, j’ai lu que selon Jean-Claude Mailly ce serait « le peuple » qui aurait fait le nazisme plutôt qu’il ne nous en aurait libéré. Connaissant l’homme, sa culture de l’histoire du mouvement ouvrier et la tradition du syndicat Force ouvrière sur le sujet, je dois dire que j’ai été littéralement sidéré. Je ne comprends pas. En tout cas il est certain que la manœuvre voulait effacer du tableau médiatique non seulement le succès du rassemblement mais surtout ses propositions.

Je doute que l’affaire vive plus longtemps que les quelques heures pendant lesquelles ont caqueté les traditionnels « débats d’experts », tous d’accord pour une petite séance supplémentaire de « Mélenchon bashing » tellement appréciée par ceux qui les payent. Mais il en restera, ancré dans les esprits, comme une blessure, la force de l’indignation de tous ceux qui ont été une nouvelle fois niés. Sans oublier ceux qui ont réalisé au fil des heures la nature de l’opération en cours. L’éducation collective du grand nombre à la méfiance et à l’hostilité face aux médiacrates se sera approfondie et affinée. Après quoi restent sur la table nos propositions et notre capacité d’initiative pour les faire vivre. Ni l’une ni l’autre n’ont jamais dépendu du bon vouloir des médias car sinon nous n’en serions déjà pas rendus au point de puissance où nous sommes.

Jean-Luc Melenchon

Facebook
Twitter
LinkedIn
Email
WhatsApp
Bally Bagayoko - LFI - Saint Denis - Pierrefitte - Communalisme Insoumis

Le Communalisme Insoumis : construire le pouvoir populaire là où l’État se retire !

Quand nous parlons du peuple, nous parlons de celles et ceux qui font vivre nos villes : celles et ceux qui prennent les transports tôt le matin, travaillent dur, élèvent leurs enfants, tiennent les murs de nos écoles, de nos hôpitaux, de nos quartiers.Un peuple populaire, jeune, créatif, résistant, aux origines multiples, souvent précaire, toujours digne. Une communauté de destin, unie non par l’identité mais par les luttes, les espoirs et la volonté de vivre mieux, ensemble. Face à un néolibéralisme en crise, qui s’acharne à démanteler tout ce qui est collectif — école, hôpital, sécurité sociale, services publics —, le communalisme insoumis propose une

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - LFI - Saint Denis - Pierrefitte - Rencontre Plaine Commune Habitat

Retour suite à la rencontre avec le personnel de Plaine Commune Habitat (PCH)

Nous tenons tout d’abord à saluer l’ensemble des personnels de Plaine Commune Habitat, en particulier celles et ceux qui œuvrent chaque jour dans les quartiers de Saint-Denis et Pierrefitte-sur-Seine. Avec un parc de plus de 20 000 logements et plus de 2 200 agents mobilisés, Plaine Commune Habitat constitue un acteur essentiel du service public du logement sur le territoire. Ces agents, en première ligne sur le terrain, incarnent au quotidien les valeurs de proximité, de solidarité, d’écoute et d’engagement. Ils représentent le visage du service public auprès des habitants, assurant jour après jour la cohésion sociale et la qualité de vie dans nos quartiers.

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - LFI - Saint Denis - Pierrefitte - Sport - Dopage

Le sport n’a pas besoin de dopage : derrière les records, il y a des vies humaines

En tant que père de famille de quatre enfants, passionné de sport, entraîneur de basket-ball et bénévole dans le domaine des activités physiques pour tous et toutes, ainsi que co-coordinateur du livret sport de La France insoumise, je souhaite exprimer mon profond désaccord avec le concept des Enhanced Games et le dopage encadré.Si la perspective de performances extrêmes peut paraître séduisante, elle cache des risques sanitaires graves pour les athlètes : troubles hormonaux, atteintes cardiovasculaires, séquelles psychologiques.Autoriser et normaliser l’usage de substances améliorant la performance, même sous contrôle médical, revient à mettre la santé humaine au second plan et à trahir l’essence même du sport.

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - LFI - Saint Denis - Pierrefitte - Budget 2026

BUDGET 2026: Non au budget de l’austérité ! Oui à la justice sociale !

Avec les député·es insoumis·es et toutes celles et ceux fidèles au programme du Nouveau Front Populaire Le gouvernement Lecornu a présenté le Budget 2026. Sous couvert de “responsabilité budgétaire”, il s’agit en réalité d’un budget d’austérité, qui fait payer la crise à celles et ceux qui la subissent déjà : les travailleurs, les retraités, les familles modestes, les jeunes, les malades. Pendant que les grandes fortunes et les multinationales sont épargnées, ce budget prélève sur les plus modestes pour combler les trous laissés par des cadeaux fiscaux à ceux qui n’en ont pas besoin. Et pendant que les député·es insoumis·es et celles et ceux qui

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - LFI - Saint Denis - Pierrefitte - Espace Jeunesse - Pierrefitte

Pour une jeunesse écoutée et soutenue : stop à la mise à l’écart de l’Espace Jeunesse de Pierrefitte-sur-Seine !

J’ai récemment reçu le compte rendu d’une réunion, transmis par des parents dont les enfants fréquentent l’Espace Jeunesse de Pierrefitte-sur-Seine. Leur témoignage, empreint d’inquiétude et de dignité, m’a profondément touché. Je comprends pleinement leur consternation face à une situation qui, au-delà de l’indignation qu’elle suscite, appelle une réponse urgente et responsable. Ce qui se passe aujourd’hui à Pierrefitte s’inscrit malheureusement dans une dynamique plus large que nous observons déjà à Saint-Denis. La fusion entre nos villes, au lieu de renforcer les services publics, semble servir de prétexte pour affaiblir encore davantage les politiques menées en direction de la jeunesse. Ce choix politique, que rien ne

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - LFI -Philippe Brun - Assemblée nationale

“Marteau-piqueur ? C’est sans doute un travailleur algérien” — propos racistes et méprisants du député socialiste Philippe Brun

Lors d’une séance officielle, le député Philippe Brun (Parti socialiste) s’est permis de déclarer, en entendant un bruit de chantier :« Marteau-piqueur ? C’est sans doute un travailleur algérien. » Une phrase raciste, lourde de stéréotypes coloniaux, qui renvoie les travailleurs algériens — et plus largement les immigrés — à des rôles subalternes, comme si leur seule place dans la société était derrière un outil, dans l’ombre. Ce n’est ni une “blague”, ni un dérapage : c’est une parole méprisante, déshumanisante, prononcée par un élu de la République. Ce même député, il y a quelques mois, lançait son mouvement “populaire” depuis la Bourse du travail

LIRE L'ARTICLE »
Bally Bagayoko - LFI -Saint-Denis - Cambriolage Louvre

Cambriolage au Louvre : un échec sécuritaire majeur

Ce matin, en plein cœur de Paris, le musée du Louvre a été cambriolé en à peine 7 minutes, sans violence. Des bijoux historiques appartenant à Napoléon et à l’impératrice ont été dérobés. Les auteurs sont toujours en fuite. Nous condamnons fermement cet acte, qui vise un patrimoine commun. Mais il soulève une question centrale : comment un tel vol peut-il avoir lieu dans l’un des lieux les plus protégés de France ?Cela fait dix ans qu’on assiste à une baisse de 15 % des effectifs humains, remplacés progressivement par des technologies censées “tout voir”, mais les caméras ne courent pas après les voleurs. Elles

LIRE L'ARTICLE »